João Freitas

R24, 15.01 - 02.03.2025
TAMAT - Musée de la Tapisserie et des Arts Textiles, Tournai, Belgium
Les échappées, created during the 2024 residency at TAMAT, with the support of the Fédération Wallonie-Bruxelles and Kultur | lx
Photo credit : Silvia Cappellari

Les Échappées 

Ma recherche a été guidée par les notions d’usure, de répétition et de temps. Mon approche des matériaux ne se limite pas à leur utilisation ; je m’attache à travailler en profondeur « dans » la matière elle-même. À travers des procédés de prélèvements minutieux, je cherche à dépasser l’anonymat apparent des matériaux en les libérant délicatement de leurs contraintes et de leurs fonctionnalités. 

J’utilise des matériaux souvent considérés comme jetables ou secondaires, tels que des toiles abrasives et des couvertures en feutre. Par des gestes de soustraction de matières je révèle leur singularité. Ce retrait constitue une rencontre existentielle avec la matérialité : à la fois en surface et en profondeur, révélant ce qui se trouve caché. Par exemple, la toile qui supporte le grain abrasif est débarrassée de ce grain, retrouvant ses propriétés textiles d’origine et présentant une instabilité nouvelle de ses contours. 

Ce processus de réduction par des gestes répétés laisse apparaître une toile marquée par les traces de mon intervention. Ce tissu, à la fois fragile et résilient, crée un équilibre entre l’absence de matière et une présence persistante. L’interaction entre pression et résistance entraîne une transformation complète des deux faces du matériau, qui deviennent semblables. Une approche similaire est appliquée à la couverture: en enlevant la partie duveteuse et protectrice, je révèle l’aspect structurel du feutre. 

Mon travail avec l’usure vise à créer des formes libérées, des échappées, où chaque matériau révèle une nouvelle dimension de son existence, intrinsèquement liée ici à la matière textile. 

Texte publié dans Carnet de Recherches R24, édité par TAMAT, 2024

English version :

The Breakaways

My research was guided by the notions of wear, of repetition and of time. My approach to materials is not limited to their use: I endeavour to work in depth "within" the material itself. Through procedures of meticulous sampling I strive to go beyond the apparent anonymity of materials, by delicately freeing them from their constraints and their functionalities.

I use materials that are often considered to be disposable or secondary, such as abrasive canvas and felt covers. Through gestures of subtraction of materials, I reveal their singularity. This withdrawal constitutes an existential encounter with materiality: both on the surface and in depth, revealing what was concealed. For instance, the canvas supporting the abrasive graining is ridded of that graining, thereby recovering its original textile properties and presenting a novel instability of contour.

This process of reduction through repeated gestures unveils a canvas marked by the traces of my intervention. This fabric, both fragile and resilient, creates a balance between the absence of material and a persistent presence. The interaction between pressure and resistance causes a complete transformation of both sides of the material, which become similar. A similar approach is applied to the cover: by removing the protective flocculent part, I reveal the structural aspect of the felt.

My work with wear and tear aims to create liberated forms, breakaways, in which each material reveals a novel dimension of its existence, intrinsically linked here to textile materials.

Translation by Philippe Hunt
Text published in Carnet de Recherches R24, edited by TAMAT, 2024.